La loi Pour la liberté de choisir son avenir professionnel a été publiée au Journal officiel du 6 septembre 2018.
Cette loi introduit de nombreuses évolutions dans l’écosystème de la formation professionnelle en France, notamment dans son Titre 1er : « Vers une nouvelle société de compétences ».
Ici, nous en retiendrons deux aspects qui, de notre point de vue, entrent en résonance pour orienter, à court terme, l’activité d’un CFI : la nouvelle définition de l’action de formation et l’obligation de certification des prestataires de formation.
Nous compléterons par un constat fait lors de notre expérience au sein de la Commission de qualification de QualiPro-CFI ces deux dernières années.
Nous en conclurons trois orientations-clés pour les consultants-formateurs indépendants.
1 – La nouvelle définition de l’action de formation
Les articles L. 6313-1, 2 et 3 précisent :
Les actions concourant au développement des compétences qui entrent dans le champ d’application des dispositions relatives à la formation professionnelle sont : 1° Les actions de formation ; 2° Les bilans de compétences ; 3° Les actions permettant de faire valider les acquis de l’expérience […] et 4° Les actions de formation par apprentissage […]
L’action de formation mentionnée [en 1°] se définit comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel.
Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance.
Elle peut également être réalisée en situation de travail.
Les modalités d’application des deuxième et troisième alinéas du présent article sont déterminées par décret.
Les actions de formation ainsi définies ont pour objet de faciliter l’accès à l’emploi, l’adaptation au poste de travail, la mutation d’activité et la mobilité professionnelle.
Ainsi se confirme l’ouverture vers des approches pédagogiques autres que le classique stage de formation en présentiel, ainsi que la volonté explicite de centrer la formation professionnelle sur le développement des compétences professionnelles des apprenants.
La Formation Ouverte et à Distance (FOAD) – travail collaboratif, classe virtuelle, formation en ligne, MOOC, … – existe depuis de nombreuses années et se trouve ainsi renforcée.
Plus récente est l’avancée réalisée dans le champ de la Formation En Situation de Travail (FEST). Le réseau ANACT/ARACT a publié, le 6 juillet 2018, un rapport sur une expérimentation de grande ampleur lancée officiellement fin 2015 par la DGEFP et pilotée avec le Copanef, le FPSPP et le Cnefop. Cette expérimentation conduit à des résultats très prometteurs ; l’un de ses apports est de formuler des repères précis pour caractériser les contours et les conditions de mise en œuvre de cette modalité de formation.
Ainsi, pour le CFI, accroître ses compétences – notamment d’ingénierie pédagogique – tant dans le domaine de la formation à distance que dans celui de la formation au plus près du lieu de travail de l’apprenant, devient un enjeu vital.
2 – La certification des prestataires de formation (articles L. 6316 – 1,2 et 3)
Les articles L. 6316-1, 2 et 3 précisent :
Les prestataires de formation financés par un opérateur de compétences, par l’Etat, par les régions, par la Caisse des dépôts et consignations, par Pôle emploi […] sont certifiés sur la base de critères définis par décret en Conseil d’Etat.
Un référentiel national déterminé par décret, pris après avis de France compétences, fixera les indicateurs d’appréciation de ces critères ainsi que les modalités d’audit associées qui doivent être mises en œuvre.
La certification est délivrée par un organisme certificateur accrédité à cet effet par l’instance nationale d’accréditation [à savoir le COFRAC] ou l’un de ses équivalents européens. La certification peut également être délivrée par une instance de labellisation reconnue par France compétences sur la base du référentiel national précédemment cité. Les organismes financeurs procèderont à des contrôles afin de s’assurer de la qualité des formations effectuées.
D’après les informations actuellement disponibles, les prestataires de formation concernés (faisant appel à des financements publics ou mutualisés) devront être certifiés au 1er janvier 2021.
3 – Un constat
Ainsi, la réflexion stratégique du CFI doit intégrer l’évolution des modalités pédagogiques et l’obligation d’être certifié pour accéder aux financements publics et mutualisés.
Nous mettons en lien les implications concrètes de la nouvelle loi avec un constat fait lors de l’étude des dossiers de candidature à la qualification QualiPro-CFI / RP-CFI, ces deux dernières années : l’une des principales difficultés pour un nombre significatif de candidats fût d’apporter des « éléments de preuve » sur les indicateurs relatifs à l’amélioration continue de leurs pratiques et de leurs compétences pédagogiques.
Quelle signification donner à ce phénomène ? Ou le CFI réalise effectivement des actions conduisant à l’amélioration continue de ses pratiques et de ses compétences, mais n’en garde pas la trace. Ou le CFI ne réalise pas d’actions d’amélioration continue dans ce domaine…
Dans les deux cas, cela posera au CFI – s’il continue ainsi – des difficultés accrues dans le nouveau contexte de la formation professionnelle, notamment pour obtenir une certification où une démarche réflexive, d’évaluation de sa pratique et de ses compétences, est nécessaire.
4 – Trois orientations pour les CFI
En conclusion de cette réflexion, nous suggérons à chaque CFI d’intégrer dans sa réflexion stratégique et son plan d’actions à court terme trois orientations-clés :
« Veiller » : assurer une veille sur la mise en œuvre de cette dernière réforme, notamment en suivant les publications prochaines des nombreux décrets attendus et de probables rapports d’expérimentation et de recherche dans le champ de l’ingénierie des dispositifs de formation.
« Améliorer » : renforcer les actions conduisant à une amélioration continue de ses compétences professionnelles, notamment en ce qui concerne son engagement dans une démarche réflexive dans le domaine pédagogique.
« Tracer » : mettre en place un ensemble de règles d’organisation permettant d’assurer une forte traçabilité de ses actions concourant à la qualité et à l’efficacité de ses prestations de formation, orientées vers le développement effectif des compétences professionnelles des apprenants.
Olivier Gourbesville
Administrateur, ancien président de la Commission de qualification